Un Xanax pour les écolos exaltés
Frédéric Amoudru
Ancien cadre dirigeant du secteur bancaire.
On veut bien croire à cette histoire de réchauffement climatique, mais on va faire la transition à notre rythme.
Voilà en substance ce que pense une majorité de Français, d'Européens et d'Occidentaux, et comme pour l'immigration, la sécurité, etc., il va falloir nous écouter, sinon c'est à un autre type de réchauffement que les élites dirigeantes vont devoir se frotter.
Les injonctions écologistes et climatiques traduites en législations punitives commencent à dérégler nos sociétés, car elles frappent durement les classes populaires et les classes moyennes. Nous sommes très majoritairement écologiques. Nous voulons protéger nos espaces naturels, éviter les gaspillages, préserver l'eau, faciliter le recyclage des déchets, émettre le moins de pollution possible, mais nous devons faire face au quotidien, et pour une grande majorité d'entre nous, il est déjà assez difficile et contraint pour ne pas rajouter des difficultés et des contraintes déraisonnables supplémentaires.
Entendez-nous bien. Ce ne sont pas les objectifs qui sont déraisonnables, mais le rythme auquel nous voulons les atteindre. Nous sommes plus ou moins tous capables de marcher une poignée de kilomètres. Certains le feront au pas de course, d'autres de façon plus détendue, et une partie peinera et aura besoin de pauses. C'est pareil pour la transition climatique. Ceux en bonne santé financière peuvent se la permettre. Les moyennement bien portants s'essoufflent. Pour les malades de la pauvreté, c'est le coup de grâce.
Mais soyons concrets. Quelles sont les mesures climatiques qui nous empoisonnent ?
La première touche au logement et à l'interdiction de la location des passoires thermiques selon un échéancier serré. Le 1er janvier 2025 pour les logements classés G (les pires), puis le 1er janvier 2028 pour les F, et le 1er janvier 2034 pour les E.
Pour être honnête, cela n'a pas été annoncé hier matin, mais à l'été 2021. Il n'en reste pas moins que des centaines de milliers de logements doivent soit subir une rénovation énergétique significative, soit être retirés de la location dans les prochaines années, dans un contexte de tension extrême sur le marché locatif.
Entre les problèmes de fiabilité des diagnostics énergétiques, le faible nombre de sociétés disposant du label RGE, qui ouvre la porte aux subventions, et les conflits entre copropriétaires pour les rénovations d'un immeuble,c'est un véritable casse-tête.
Les professionnels du secteur et de nombreux élus pointent le danger d'une pénurie dramatique de logements locatifs et d'une véritable explosion sociale.
Le bon sens, qui n'est ni d'extrême droite ni climato-sceptique, impose un report de 2 ans pour les deux premières catégories (G et F), donc à 2027 et 2030, afin que la filière dispose de plus de temps pour s'adapter à cette nouvelle donne. Le bilan climatique de la planète n'en souffrira pas.
L'autre loi qui pose problème est celle appelée "Zéro Artificialisation Nette". De quoi s'agit-il ?
Commençons par une explication fournie par l'INSEE : "Transformation d'un sol à caractère agricole, naturel ou forestier par des actions d'aménagement, pouvant entraîner son imperméabilisation totale ou partielle. Ce changement d'usage des sols, le plus souvent irréversible, a des conséquences qui peuvent être préjudiciables à l'environnement et à la production agricole.
L'artificialisation résulte de l'urbanisation et de l'expansion des infrastructures, sous l'influence de la dynamique démographique et du développement économique. Les surfaces artificialisées regroupent l'habitat et les espaces verts associés, les zones industrielles et commerciales, les équipements sportifs ou de loisirs, les réseaux de transport, les parkings, ou encore les mines, décharges et chantiers.
Pour faire simple, l'artificialisation des sols, c'est la bétonisation, et franchement, personne n'aime ça. La loi ZAN, adoptée le 21 juillet 2023, prévoit de réduire de 50% le rythme de bétonisation d'ici 2030 pour atteindre le Zéro Artificialisation Nette en 2050.
Ceci signifie qu'entre 2021 et 2031, la France ne pourra artificialiser que 12 000 hectares par an en moyenne, comparé au double de la décennie 2011-2021, soit environ 24 000 hectares, un chiffre considéré comme épouvantable. Puis, progressivement jusqu'en 2050, nous devrons atteindre une artificialisation nette de zéro, c'est-à-dire que toute bétonisation devra être intégralement compensée par une renaturalisation.
Toutefois, le gouvernement a fait des concessions.
Exclusion du décompte de l'artificialisation des "projets d'ampleur nationale ou européenne présentant un intérêt général majeur."
Création d'un forfait national de 12 500 hectares pour les "projets d'ampleur nationale ou européenne présentant un intérêt général majeur."
Création d'une enveloppe minimale d'artificialisation d'un hectare garantie à chaque commune, couverte par un document d'urbanisme, dans le cadre de la première période décennale.
Malgré ces concessions, cette stratégie pose d'énormes problèmes
Car nous manquons de logement en France, et il faut construire, en particulier des maisons individuelles, car c'est ce que veut une grande majorité de Français, comme nous le verrons ci-dessous.
Mais essayons d'abord de mesurer de quoi on parle. La superficie de notre pays dépasse 550 000 km2, soit l'équivalent de 55 millions d'hectares. Donc, quand on artificialise 24 000 hectares par an comme dans la décennie 2011-2021, c'est moins de 0,05% du territoire. On est donc dans l'infra-minimal, et pourtant, chez les dirigeants de ce pays, on est prêts à provoquer une crise du logement pour calmer l'agitation des écolos.
Toutefois, au-delà de la question de l'aspect esthétique et de l'impact sur les sols naturels, la principale objection au développement de la maison individuelle, c'est qu'elle contribue aux déplacements automobiles. Il n'y a aucun doute sur ce point, mais puisque nous nous dirigeons lentement mais sûrement vers la voiture électrique ou à hydrogène, disons-le, ils nous embêtent !
La France est-elle très bétonnée par rapport aux autres pays européens les plus peuplés ?
La réponse est plutôt non mais avec un bémol. Avec un taux d’artificialisation de 5.7% du territoire pour une densité de 107 habitants au km2 alors que l’Allemagne ou l’Italie artificialise à peine plus avec des densités de population bien supérieures la France bétonne pas mal et cela tient à plusieurs phénomènes :
- Le développement des lotissements de maisons individuelles qui restent le rêve français par rapport au logement collectif. Comme le montre années après années les sondages nos concitoyens sont ultra majoritaires à vouloir ce mode de logement. 84 % selon le dernier sondage IFOP Le regard des Français sur la maison individuelle & l'accès à la propriété (ffcmi.com)
-La multiplication des zones commerciales qui ont littéralement envahie le pays et jusque dans la France rurale.
Toutefois il faut tenir compte d’un facteur qui est celui de l’attractivité touristique de notre pays qui fausse les comparaisons avec d’autres pays. 75 millions de gens visitent notre pays chaque année. Même si beaucoup ne font que passer ou résident brièvement dans des hôtels, les régions touristiques doivent accueillir des millions de vacanciers Etrangers et Français chaque année. Il y a donc un vrai solde migratoire saisonnier de masse qui impacte sur le besoin de logement.
Dans le même temps les besoins de logement permanent de la population française restent élevés même s’il y a polémique sur le nombre réel de logements neufs dont la France a besoin
Dans un article du 3 octobre 2023 le quotidien « Les Echos » montrait certaines divergences dans l’estimation e ce besoins. La Fédération des promoteurs immobiliers (FPI) l'avait évalué il y a quelques mois à 449.000 par an pendant dix ans. Pour sa part a que la Cour des comptes l'estimait un peu plus tôt à 370.000. L'Union sociale pour l'habitat (USH), qui fédère les organismes HLM, considère - en se basant sur une étude commandée au cabinet HTC tout juste publiée - qu'il faudrait construire ou remettre sur le marché 518.000 logements par an entre 2024 et 2040, dont 198.000 logements sociaux.
Fourchette haute ou basse il faut construire si nous voulons éviter une grave crise sociale liée au manque de logement.
La réponse des écologistes, qui ont pris en otage les pouvoirs publics et les médias, est qu'il faut "densifier les zones déjà construites." Ce n'est pas ce que veulent les Français qui souhaitent une maison avec un petit bout de verdure, même si cela les éloigne de leur lieu de travail. C'est leur pays, c'est à eux de décider.
Globalement, le taux d'artificialisation de la France est dans la bonne moyenne de l'Union, et elle a encore un peu de marge. Mais cette marge doit être utilisée pour satisfaire le besoin social essentiel qui est l'habitat pour les résidences principales, pas pour des appartements et des villas qui seront mis en location saisonnière dans des zones touristiques déjà saturées. Il est également hors de question de continuer à bétonner notre pays pour y installer des centres commerciaux ou des centres logistiques déjà extrêmement nombreux, mais il faut de la place pour installer les nouvelles usines dont nous avons besoin pour réindustrialiser le pays.
Il y a donc débat aujourd'hui sur les limitations imposées par la loi ZAN. Si l'objectif de 0% d'artificialisation nette en 2050 fait consensus, c'est la réduction de 50% sur la période 2021-2031 par rapport à 2011-2021 qui met en colère de nombreux maires. C'est trop restrictif. Une baisse de 30% au lieu de 50% sur cette période est un chiffre supportable afin de combiner les besoins de logement et la protection des terres naturelles, quitte à accélérer le rythme de réduction sur la période suivante, car la stabilisation de la population va jouer un rôle clé.
" Toutefois, il va aussi falloir être cohérent sur le lien entre l'habitat et la migration. Les progressistes veulent moins de terres destinées au logement, mais plus d'immigration qu'il faut bien loger ! "
Autre grand sujet, les Zones à Faible Émissions ou ZFE. L'idée est d'empêcher l'accès à 43 agglomérations durant la journée des véhicules les plus polluants, c'est-à-dire ceux ayant un label Crit'Air 5, 4, ce qui est fait, puis 3, ce qui devrait intervenir fin 2024. S'il n'y a pas grand monde pour contester la mesure concernant les deux premières catégories, qui sont les véhicules diesels immatriculés avant 2005, dont les émissions de particules fines sont insupportables et qui de toutes façons ne sont plus très nombreuses, il y a un gros problème avec l'interdiction du Crit'Air 3. Cette catégorie couvre les voitures à essence immatriculées entre 1997 et 2005 inclus, et les diesels entre 2006 et 2010 inclus, concerne environ 14 millions de véhicules, soit près de 40% du parc "théorique". Théorique car une partie des voitures les plus anciennes ne sont plus en circulation.
Quand on appartient à la classe moyenne aisée ou supérieure, on a rarement une voiture aussi ancienne car son coût d'entretien et sa consommation de carburant sont trop élevés. Le fait est que plus bas dans l'échelle sociale, l'achat d'une voiture neuve ou plus récente représente un effort trop important, même avec les aides gouvernementales, d'ailleurs terriblement coûteuses pour les finances publiques. Ceci dit, année après année, ces véhicules sortent progressivement de nos rues, même si cela se fait à un rythme assez lent. On peut parallèlement comprendre la préoccupation des habitants des centres urbains face à la pollution automobile qu'ils subissent. Ce ne sont pas tous des "bobos", comme le prétendent certains.
Mais là où les choses empirent, c'est que même les véhicules Crit'Air 2, soit des voitures à essence immatriculées entre 2006 et 2010, et les diesels immatriculés après 2011, donc relativement récents, seraient interdits en 2028. Nous parlons de 30% du parc automobile. Il est certainement souhaitable d'avoir un parc auto qui rajeunit, mais le problème c'est que le prix des véhicules s'est envolé au cours de ces 10 dernières années (+40% en moyenne), ce qui fait que changer de voiture constitue une charge très lourde.
La solution, comme pour l'ensemble de la transition écologique, c'est la patience qui doit prévaloir et donner aux gens le temps de s'adapter. Il faut donc repousser ces limites à fin 2027 et à fin 2030 pour respectivement les Crit'Air 3 et les Crit'Air 2, donc 3 ans de plus.
Certains diront qu’il ne faut pas d’interdiction du tout car les gens qui ont acheté leurs bagnoles il y a des années l’ont fait de bonne foi et ne devraient pas subir les conséquences des changements de législation. Cela peut s’entendre mais aucune civilisation ne peut fonctionner ainsi. Partout et de tout temps les normes ont évolué et ces changements ont impliqués des efforts et des couts.